Le droit du sol affaibli par la loi immigration
Par Régularisation Séjour
Parmi les mesures les plus symboliques de la loi immigration adoptée le 19 décembre 2023, figure la fin de l’automaticité du « droit du sol ». Jusqu’ici , un enfant né en France de deux parents étrangers obtenait automatiquement la nationalité française à ses 18 ans (s’il avait vécu en France au moins 5 ans depuis ses 11 ans et y résidait à ses 18 ans). Dorénavant, il devra engager une démarche à sa majorité pour obtenir la nationalité française.
Le Droit du sol
Le droit du sol permet à un enfant né en France de parents étrangers d’acquérir la nationalité française à ses 18 ans.
Le droit du sol un texte désormais rétréci
La nouvelle loi immigration prévoit de modifier le droit du sol, qui encadre l’obtention de la nationalité française. Cette dernière ne sera plus automatique.
Cette nouvelle loi sur l’immigration et l’asile votée par le Parlement a fragilisé la condition des étrangers en France sur le droit d’asile, les reconductions à la frontière, la régularisation dans les métiers en tension et l’aide médicale d’Etat. Mais peu de débats ont porté sur le rétrécissement du droit du sol qu’opère cette loi.
Ce virage droitier risque de fragiliser la condition des jeunes nés en France de parents étrangers qui devront à nouveau, comme c’était le cas lors de l’adoption de la loi Pasqua de 1993, faire une démarche volontaire pour l’accès à la nationalité française dans les années précédant leur majorité, alors qu’ils sont nés et ont toujours vécu sur le territoire national.
En effet, le droit du sol est l’une des voies pour obtenir la nationalité française. Il implique que si un enfant est né sur le territoire français de deux parents étrangers, il n’est pas tout de suite Français. Il le deviendra automatiquement à ses 18 ans s’il remplit deux conditions : d’abord, s’il réside en France au moment de ses 18 ans et s’il a vécu en France pendant au moins cinq ans depuis ses 11 ans. Si ces deux conditions sont remplies, la personne née en France devient automatiquement française à ses 18 ans, sans faire de démarche. La nationalité peut même être acquise plus tôt, dès 13 ans, mais dans ce cas, il faut que le représentant légal de l’enfant, ou l’enfant lui-même, la demande.
C’est donc ce droit du sol qui a été modifié par la loi. Ce nouveau texte adopté le mardi 19 décembre prévoit la fin de l’automaticité. À 18 ans, un enfant né en France de parents étrangers ne deviendra pas automatiquement français. Il devra engager des démarches et faire une demande entre ses 16 et ses 18 ans.
Le droit du sol modifié une première fois en 1993
Ce n’est pas la première fois que la loi demande à des enfants nés en France de manifester leur volonté de devenir Français. Depuis 1945, la règle était qu’un enfant né en France de parents étrangers était reconnu français à sa majorité, mais cette règle a été modifiée une première fois en 1993. C’était lors d’une réforme sur le droit de la nationalité portée à l’époque par Charles Pasqua, alors ministre de l’Intérieur.
À partir de cette date, l’acquisition de la nationalité française à la majorité n’a plus été automatique. La personne devait demander la nationalité entre ses 16 et 21 ans, ce qui est assez proche donc de ce qui a été voté mardi 19 décembre. Malgré tout, cette disposition est restée en vigueur relativement peu de temps puisque la gauche, de retour au pouvoir en cohabitation en 1998, est revenue à l’attribution automatique de la nationalité française à la majorité.
La décision du Conseil constitutionnel sur le droit du sol
Le Conseil constitutionnel censure le durcissement du droit du sol à Mayotte, en Guyane et à Saint-Martin. En effet, considérée comme un « cavalier législatif » par les Sages du Conseil constitutionnel, cette disposition, qui faisait partie des quelques mesures spécifiques aux territoires d’Outre-mer, a été supprimée du texte le jeudi 25 janvier.
Les Sages ont estimé que « ces dispositions relatives à certaines conditions d’acquisition de la nationalité française ne présentent de lien, même indirect, avec aucune des dispositions qui figuraient dans le projet de loi déposé » par le gouvernement. L’article 81 est donc ce qu’appellent les constitutionnalistes un « cavalier législatif », interdit par l’article 45 de la Constitution.